Devoir de mémoire et justice oubliée
L’histoire politique récente de la République Démocratique du Congo reste marquée par des drames qui résonnent encore dans la mémoire collective.
De Floribert Chebeya, militant des droits humains assassiné, à Michael Sharp et Zaida Catalán, experts des Nations unies tués lors de missions en RDC, les zones d’ombre entourant ces événements mettent en lumière un manque de justice et de reconnaissance.
Comme le rappelle Mbembe (2000), une société qui refuse d’affronter son passé s’expose à la répétition des mêmes tragédies. Pourtant, ces crimes largement documentés continuent d’endeuiller les populations locales sans qu’une réponse judiciaire et politique appropriée ne soit apportée.
Plus de 10 000 morts, des vagues de viols et massacres perpétrés par le M23 à Goma et Bukavu illustrent une violence systémique qui exige des mécanismes de réparation et de justice.
L’héritage politique de Kabila : entre opacité et faillite
Au-delà des drames humains, l’après-Kabila se caractérise par une gestion chaotique de l’État. Son règne de 18 ans n’a pas permis de fédérer 15 Congolais dignes, capables de bâtir un pays basé sur la souveraineté et l’indépendance politique.
Bayart (2008) souligne que les régimes post-autoritaires africains cultivent souvent une latence stratégique, préservant des leviers d’influence en retrait. Cela s’illustre dans la gestion opaque du pays sous Kabila, marquée par un contrat chinois fantôme, dont les retombées économiques restent floues, et une Commission Électorale sous l’emprise de Corneille Nangaa, devenu chef rebelle, révélant une continuité troublante entre les institutions officielles et les forces contestataires armées.
Ambiguïtés et marginalisation des dynamiques populaires
Les interventions médiatiques de Joseph Kabila en 2025 n’apportent aucune clarification sur des sujets majeurs comme le rôle du Rwanda et du M23 dans la déstabilisation de l’Est du pays. Ce silence politique traduit une posture ambivalente qui alimente les interrogations sur ses liens et influences dans la région.
Comme le mentionne Laclau (2005), les discours populistes reposent sur l’ambiguïté pour maintenir leur centralité sans engagement explicite. Cette stratégie se reflète dans le mépris affiché envers les Wazalendo, groupe de résistance populaire né en réponse aux agressions, et son absence de prise de position sur la jeunesse engagée, les femmes et les victimes des tueries, renforçant l’image d’un ancien régime déconnecté des réalités contemporaines.
Un avenir sous l’ombre du passé
Aujourd’hui, la RDC peine à se libérer des séquelles d’un passé politique encore omniprésent. L’ombre de Kabila continue de planer sur un tableau marqué par l’incertitude et la fragilité institutionnelle.
Le silence sur ces injustices constitue une complicité, affirme Nora (1984) en évoquant le rôle de la mémoire collective dans la reconstruction des nations.
Mais le monde doit agir. Le silence est une complicité. La reconnaissance des injustices et des luttes populaires ne peut plus être ignorée, sous peine d’alimenter davantage l’instabilité et la souffrance du peuple congolais.