En réaction à la lettre adressée le 29 mai 2025 par plusieurs membres du Congrès américain à l’Envoyé spécial du Président Donald Trump pour l’Afrique, le Collectif Amka Congo exprime ses vives inquiétudes quant à la situation géopolitique en République Démocratique du Congo.
À travers cet appel citoyen, le collectif met en lumière les enjeux cruciaux soulevés par la Déclaration de principes signée le 25 avril 2025 entre la RDC et le Rwanda, notamment en matière de souveraineté nationale, de justice, de gouvernance des ressources naturelles et de coopération internationale équitable.
Par cette initiative, Amka Congo interpelle les parlementaires américains et appelle à ce que toute action diplomatique soit guidée par une exigence de paix juste, durable et respectueuse des droits fondamentaux du peuple congolais.
La souveraineté au cœur des préoccupations congolaises
Dans cette correspondance, ce collectif des mouvements citoyens insiste sur la restauration de la paix, qui selon ce Collectif ne peut être décrétée sans justice ni souveraineté populaire, il pense que tout accord international engageant la RDC doit faire l’objet d’un débat national et respecter l’intégrité du pays. « Nous y défendons une gouvernance fondée sur la dignité, une gestion souveraine et équitable des ressources naturelles, et appelons à une coopération américano-congolaise ancrée dans le respect des peuples et des mémoires. Le projet du corridor de Lobito est également évoqué comme levier de stabilisation régionale à condition d’une véritable inclusion locale » ; indique Amka Congo dans cette lettre ouverte transmise au Congrès américain le 31 mai 2025.
Depuis plus de deux décennies, l’Est de la RDC est ravagé par une guerre minéralo-financière où les ressources naturelles du pays, notamment l’or, le coltan, le cobalt, le lithium, le pétrole, le gaz et la biodiversité, deviennent les moteurs du conflit plutôt que des instruments de développement. Amka Congo alerte sur le pillage systématique des minerais et les interventions étrangères, qui ont plongé la région dans une spirale de violences, de déplacements de population et d’instabilité politique.
Le corridor de Lobito : un projet sous conditions
L’investissement américain dans le corridor de Lobito est salué par le Collectif Amka Congo comme une initiative potentiellement bénéfique pour la stabilisation régionale et l’intégration économique du continent africain.
Cependant, Remy Kasindi Lurhakwa qui signe cette correspondance met en garde contre une approche exclusivement axée sur l’exploitation minière. Il plaide pour que ce projet soit un véritable levier de reconstruction, impliquant les populations locales et garantissant des infrastructures essentielles pour le développement humain, l’intégration des énergies vertes, des programmes de formation technique adaptés aux besoins de la jeunesse congolaise et un suivi citoyen transparent pour mesurer l’impact réel du projet.
Le rôle des États-Unis ne devrait pas être d’imposer des solutions, mais de soutenir les dynamiques locales de paix et de gouvernance responsable, notamment par :
- Un financement accru aux organisations de médiation et de réinsertion des ex-combattants ;
- Le renforcement des capacités judiciaires contre l’impunité ;
- La création d’un fonds souverain pour la paix, alimenté par une fraction des revenus miniers ;
- La mise en place d’un cadre de concertation RDC-USA sur la justice et la paix.
L’exigence d’une paix fondée sur la justice et la dignité
Les Congolais, selon le Collectif Amka Congo, ne réclament pas la guerre, mais ils refusent une paix d’amnésie et d’humiliation.
Pour ce collectif, une paix durable nécessite des institutions redevables, une armée souveraine, une justice réparatrice, une éducation qui préserve la mémoire collective, en transmettant l’histoire du pays aux générations futures, et une diplomatie transparente où les accords internationaux sont débattus dans le respect du peuple congolais.
Une coopération américano-congolaise basée sur l’écoute et la justice
Dans sa lettre, le Collectif Amka Congo exhorte les États-Unis à mener une coopération équilibrée, fondée sur le respect des initiatives locales et des droits fondamentaux.
Le collectif propose plusieurs mesures pour renforcer la gouvernance et la justice en RDC. Parmi elles figurent le soutien direct aux organisations communautaires qui œuvrent à la médiation et à la réintégration des ex-combattants, le renforcement du système judiciaire afin de combattre l’impunité et de poursuivre les responsables de crimes de guerre, la création d’un Fonds Souverain pour la Paix financé par une part des revenus miniers et géré par un comité tripartite composé de l’État, de la société civile et des partenaires internationaux, ainsi que l’instauration d’un cadre de concertation RDC-USA réunissant société civile, parlementaires et survivants des conflits afin de suivre et réorienter les priorités de paix.
Nord et Sud-Kivu : entre désespoir et réveil citoyen
Les provinces du Nord et du Sud-Kivu sont décrites dans la lettre comme des zones profondément affectées par une crise sécuritaire, économique et psychologique.
Le conflit en cours, combiné à l’impunité des groupes armés et au soutien militaire présumé du Rwanda au M23, a engendré un climat de désespoir, particulièrement chez les jeunes privés d’avenir, les femmes survivantes de violences et les enfants plongés dans l’exil.
Aujourd’hui, ce n’est plus seulement la guerre qui tue, souligne Remy Kasindi Lurhakwa, mais l’épuisement intérieur et la dépression collective. Il met en avant la nécessité de mobiliser les citoyens et de promouvoir une résistance pacifique afin que la RDC ne soit pas un terrain d’exploitation minière et d’accords diplomatiques imposés, mais une nation souveraine et déterminée.
Un appel à une diplomatie éthique et engagée
Amka Congo plaide enfin pour l’ouverture d’un dialogue diplomatique respectueux des peuples, fondé sur la justice et la mémoire collective. Il suggère à cet effet la création d’un groupe d’échange RDC-USA réunissant des chercheurs, survivants et législateurs afin d’aborder les enjeux de justice et de paix de manière constructive et transparente.
« La RDC n’est pas un simple gisement minier, c’est une nation qui revendique sa dignité et son avenir », conclut Remy Kasindi Lurhakwa.